A l'occasion de la rentrée du théâtre Casino Barrière, nous sommes allés à la rencontre d'un des producteurs de spectacles de la salle, Michel Goudard.
Dans une conversation sans concession, Michel Goudard, directeur de Box Office, en autres, nous livre son point de vue sur l'utilité d'une telle salle, les enjeux du monde du spectacle à Toulouse ou encore sur la production actuelle.
Pourquoi avoir choisi le Casino Barrière de Toulouse pour lancer la saison de Box Office ?
Le Casino Barrière fait sa rentrée aujourd'hui, et comme la plupart des médias se déplacent pour ce rendez-vous, et comme je sais comment il est difficile de solliciter les médias en début de saison avec tous ce que vous avez à faire, tant qu'à être ici autant faire d'une pierre deux coups. On a quand même treize spectacles au Casino Barrière cette saison qui vont de l'humour, à la chanson au spectacle pour enfant. Il n'était pas inopportun de ce voir dans ce magnifique théâtre.
Cette salle, selon vous, apporte quelque chose de plus à la Région ?
Oui tout à fait. Sincèrement, Toulouse souffrait de ne pas avoir de salle de spectacles qui accueillent les productions privés. Je veux dire par là que les indépendants, que nous sommes, n'ont pas facilement accès aux salles institutionnelles subventionnées. Donc, on était un peu meurtri de ne pas pouvoir présenter tous les spectacles qui nous étaient proposés à Toulouse. Quand le Casino Barrière a été construit, ce lieu de 1 250 places, on était ravi moi et mes confrères toulousains de pouvoir présenter nos productions. D'ailleurs, ils sont victimes de leur succès car ils ne vous ont peut-être pas dit, c'est qu'aujourd’hui le calendrier est complet. On ne peut plus rien prévoir pour la saison en cours. Sauf si on a un artiste exceptionnel. On est déjà passé à 2013-2014.
En clair, une salle indispensable pour les spectateurs autant que pour les professionnels ?
Tout à fait : cette salle est utile et indispensable. Et, qu'une deuxième salle sur Toulouse de même capacité, voire légèrement plus grande, de 1500 places, et totalement ouverte à la production indépendante, serait plus utile qu'une structure polyvalente, actuellement envisagée à Toulouse. Je suis contre ce projet car on ne peut ni faire du sport dans des bonnes conditions ni faire des spectacles de belles tenues. Surtout dans la ville où il y a le plus beau Zénith de France. Pourquoi alors se flageller en construisant un deuxième lieu qui va devenir concurrent au premier. Pour arriver à faire quoi : dépenser beaucoup d'argent dans une période, où j'entends qu'il faut faire beaucoup d'économie. Je ne suis pas certain que les personnes qui investissent ont conscience de savoir où elles mettent l'argent du contribuable.
On revient toujours à l’éternel problème du Stadium de Toulouse et de son incapacité à recevoir des spectacles musicaux.
Ah oui ! Il aurait été plus opportun de faire le nécessaire, ce que je demande depuis 15 ans, pour qu'il puisse accueillir des spectacles. On m'a sollicité pour faire Bruce Springsteen à Toulouse. Evidemment, je ne peux pas car le Stadium est dans l'incapacité de le faire. Comme j'ai dû refuser Madonna ou encore Johnny Hallyday. Je ne peux pas m'aventurer là-dedans comme je l'ai fait au stade de Bordeaux. Par contre, ce que je trouve absolument terrible, c'est qu'il y a la clientèle. Ce sont des spectacles exceptionnels avec des fréquences très longues. C'est à dire que des spectacles de ce type là, vous pouvez en avoir un tous les 3 ans. Mais un tous les trois ans, c'est aussi l'image d'une ville.
La saison 2012-2013 débute dans les semaines qui arrivent. Quels sont vos coups de cœur ?
Mes coups de cœur sont un peu particuliers. Mon premier est un humoriste, Abdelkader Secteur, découvert dans le Jamel comedy Club. Nous commençons par deux dates, l'une à Bordeaux et une à Toulouse. Ce sera, ici, à la Comédie le 28 novembre. La spécificité de cet humoriste, j'espère que vous apprécierez tout son humour, mais on va commencer par vous dire que tout son spectacle est en arabe. Donc il s'adresse à toute une communauté, je suis heureux de vous le présenter. C'est une star en plus au Maghreb. Et puis en second, je dirais que c'est le spectacle de Dani Lary. J’ai été bluffé l’an dernier au Zénith à Toulouse. On revient avec un nouveau spectacle, de nouvelles illusions, de la magie un peu partout, une mise en scène époustouflante : un vrai show pour toute la famille. C'est incroyable tout ce qu'on y voit. Un vrai coup de cœur car là, on renoue avec le musical dans sa grande tradition.
Comme les années passées, des comédies musicales sont au programme.
Là, il y a Mamma Mia, 1789 les amants de la Bastille et l'Age de la glace qui est extrait du film qu'on présentera en avril au Zénith. Mamma Mia reste quand même la comédie musicale la plus jouée dans le monde. 1789 est surtout la nouvelle production de Dove Attia et Albert Cohen qui ont créé un vrai label avec le Rois Soleil et Mozart. Tout ce qu'ils font se transforme en gros succès. On sait que le public les attend. Ils savent que c'est un label de qualité. Donc ils y vont instinctivement. C'est très bien pour eux, pour nous et pour les jeunes artistes sur scène.
La grande déception reste l'annulation d'Adam et Eve. Comment l’avez-vous ressenti ?
Je l'ai ressenti douloureusement. Ce n'est pas une question d'argent pour moi. C'est une question de respect du travail qui a été fait. C'est un travail de deux ans et demi pour les auteurs, les artistes. C'est des décors, énormément de personnes qui travaillent sur un projet. Je dirais par bonheur qu'il a eu la chance d'avoir été joué à Paris. C'est un superbe spectacle. Adam et Eve méritait un autre sort. S’il ne tourne pas, c'est que c'est très lourd dans sa logistique avec plus de 20 semi-remorques sur la route avec des artistes, des artifices….le coût de la production est énorme. Si le taux de remplissage des salles n'est pas à son maximum, cela devient impossible. Face à l'impossible nul n'est tenu. Là, l'Himalaya était très difficile à franchir pour les producteurs. Personnes n'auraient pu maintenir ce spectacle dans l'état actuel des choses. C'est une énorme injustice pour un si beau spectacle.
Pour finir, une question plus personnelle. A Toulouse, on connait Box Office, mais vous avez créé une vraie organisation dans le spectacle.
C'est juste l'histoire. Le temps qui passe. D'une association, on est devenu une SARL Euterpe promotion puis on est rentré dans la production. Il nous paraissait opportun à moment donné qu'il fallait vendre de la billetterie alors on a ouvert Box Office. Ainsi on apporte une proximité avec le client. Après il fallait créer une boite de production car les producteurs voulaient qu'on s'associe dans une prise de risque d'où Alhambra production. Cette dernière, les artistes veulent qu'on les accompagne dans leurs débuts. D'où la création d'une maison d'édition, Zaroza. On fait notre métier du début à la fin. On essaye de maitriser tout. Si ça ne va pas, c'est de ma faute. Mais si ça va, c'est aussi de ma faute.
Sans oublier un théâtre à Bordeaux…
Oui, j'allais l'oublier. Je suis propriétaire d'un théâtre à Bordeaux de 1 250 fauteuils : le Femina. J'y accueille une soixantaine de spectacles par an.