Avec un quatrième album au nom plus ou moins étrange, "La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur", Cali revient sur le devant de la scène avec talent à la veille d'une énorme tournée qui passera le 12 mai par le Zénith de Toulouse : Rencontre avec un nouvel homme.
On avait laissé Cali dans l'Espoir. On le retrouve aujourd'hui plus talentueux que jamais avec son dernier opus "La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur". Personnage haut en couleur, touchant, bouleversant, le catalan aime surprendre. Avec son dernier opus, Cali prend la musique à bras le corps pour remonter le courant musical d'une scène française timide. Après trois albums au succès impressionnant, Cali se lance dans une aventure toute fraîche, colorée et intuitive. Une bière à la main, assis en terrasse, grosse veste sur les épaules, l'homme revient sur son nouvel opus.
Pour ce quatrième album, il y a énormément de changement chez toi. Comment s'est passé la construction de "La vie est une truite arc-en-ciel qui nage dans mon cœur" ? On ne s'use pas après toutes ces années ?
S'user ? Non, je ne crois pas parce que tout se tarit obligatoirement, et je suis dépendant de choses nouvelles. C'est d'abord des rencontres. Puis, j'ai dorénavant le public en face de moi quand j'écris. Ce qui est différent du premier album. Le but de ce grand jeu, car pour moi c'est un jeu, c'est d'explorer plein de chemins. C'est la raison pour laquelle je me suis entouré de musiciens différents, et donc de talents différents.
Cet opus est beaucoup plus rock. Quand on connait ton énergie scénique, cela est une évidence. Cela l'a été pour toi ?
Oui, c'est une évidence. C'est plus que ça. Le côté très rock chez moi vient de très loin. Il est enraciné dans mon âme. J'ai l'habitude d'écouter cette musique depuis des années et aujourd'hui encore. Les groupes qui me marquent sont ceux qui font du rock comme Deus, Ginzu ou encore les vieux dinosaures comme U2. J'aime leur rock héroïque des débuts. Il y a aussi le rock que j'écoutais ado comme Simple Minds ou encore the Clash à fond. Le tout devait sortir à un moment donné. C'est aujourd'hui le cas.
Tu as tourné avec Les hyènes formés par des membres de feu Noir Désir. Leur séparation t'évoque quoi ?
Noir Désir, je pense qu'au delà du drame où plusieurs familles ont été détruites par la presse qui a été odieuse et ignoble, c'est un grand groupe qui part. Mais, encore une fois, si pour les Beatles ce n'est plus possible, il y a un espoir qu'un jour ils se reforment. Faut y croire.
A l'écoute de l'album, un chanteur entre autre me vient à l'esprit : Bashung. Tu es d'accord?
Bashung, c'est une évidence. Mais tout autant que Thiéfaine et Lavillier. Ou encore Ferrer. On a eu la chance avec Raphaël de tourner avec lui. Donc il y a forcément des traces plus tard. Ces moments m'ont gravé quelque chose dans le cœur. Et, consciemment ou inconsciemment, j'ai été attiré vers lui.
Et il y a aussi ce coup de foudre pour Ferrer…
Coup de foudre, c'est exactement ça. Au début, c'était un OVNI. Je n'y arrivais pas. Il me semblait pour autant que je passais à côté de quelque chose. Puis il y a eu un miracle. J'ai ouvert une vanne et j'ai plongé dans l'océan Ferrer. J'ai tout découvert, je m'en suis imprégné. Autant sa musique que sa vie d'homme avec ses hauts et ses bas. Car, au final, il y a de la poésie dans tout ça. Tu peux écouter une chanson le matin, et le soir elle n'a plus la même signification.
Après une longue tournée, il y a eu un temps d'absence avant de te revoir. Comment s'est passé l'écriture de cet album pendant cette période ?
Pour celui-ci, ça s'est fait après une longue pause, tu l'as dit, suite à l'Espoir. J'étais chez moi et je n'avais aucune pression. Au contraire. Puis je me suis penché sur Madame Butterfly. Ce fut une vrai farandole par la suite. Et, il a eu aussi un événement décisif : Daniel Roux m'a quitté, mon beau Daniel. Pour lui, je me suis enfermé pour écrire.
Tes chansons respirent la justesse, elles sont imprégnées par l'instant présent non?
Je me dis à chaque fois, c'est le dernier. Je suis un peu un imposteur. Le bonheur est d'être dans l'instant T, non ? La suite, le but du jeu, est de faire une belle tournée. Pour chaque chose, il y a une période. Dans quelques temps j'entame la tournée, pour l'instant je suis dans l'instant T.
Je reviens sur ton écriture, elle est sporadique. C'est une nécessité d'écrire ?
Un besoin. Je n'ai pas le talent pour la peinture, sinon j'en ferais. Un peu dans l'esprit d'un Pollock, un peu fou. L'absurdité de la vie nous construit. Je suis amoureux des mots. Ce sont les mots qui me font rêver pour des années. Et surtout pour ne pas devenir fou, j'ai ce besoin. Certain parlent de leur vie, moi je l'écris. Le plus touchant, c'est quand on vient me voir pour me parler de sa vie à la lumière de mes chansons. Je trouve ça émouvant et adorable.
T'as une relation toute particulière avec ton public.
Vraiment, à chaque instant. J'aime nos moments en commun. Il y a une fille tout à l'heure qui pleurait. Je me dit c'est fou. J'écris dans ma chambre et une fille vient me témoigner de l'émotion. C'est une belle preuve d'amour en direct.
Pénétrons dans l'album un peu plus. Une des chansons s'appelle Cantona : c'est un modèle pour toi ?
Il y a le joueur de foot qu'il était que j'affectionnais énormément, mais il y a aussi une vie. C'est un ami, il m'amène énormément à chaque instant. Il y a beaucoup d'espoir dans cet homme. Il ne vient pas d'une famille aisée, mais il est d'une facture incroyable. Il est allé au plus haut tout en connaissant un côté sombre. Ce sont les vrais héros qui montrent leur côté obscur. Certains peuvent l'évoquer sous le terme de paria. Eric est adorable avec les gens, ce sont les gens lisses dont ils faut se méfier.
Dans une autre, assez bouleversante, tu évoques le fait d'arrêter de boire. Tu en es où ?
Pas encore. Regarde, j'ai une bière dans la main. Ce ne sera pas pour tout de suite. Mais j'y pense. Ce poison détruit des familles. Il fout la honte à ceux qu'on aime comme quand on voit quelqu'un de proche sombrer. C'est terrible de voir des personnes aliénées à cause de l'alcool ou d'autres substances. Et, tu sais, en plus d'être malheureux, on rend les gens autour malheureux. Donc, cette chanson évoque cela.
Peux-tu me parler d'une chanson : Lettre au ministre du saccage des familles. Il y a un côté le Déserteur de Boris Vian.
Merci, pour la comparaison. Je me suis beaucoup passionné pour ce texte. Le déserteur a connu une censure incroyable à l'époque. Pour la lettre, je voulais surtout montrer qu'on est là, qu'on pense à vous. Car il y a des familles qui souffrent et elles ne cherchent qu'un asile pour vivre. Donc, cela me perturbe profondément. M'atteint même.
Parlons un peu de ta relation avec Toulouse où on a pu te voir au Bikini avec Zebra.
Oui, c'était au Bikini. J'adore le Bikini, il y a un accueil incroyable.. Hervé reçoit les stars de la même manière que les autres. Et vice versa. La salle a une acoustique aussi incroyable…
Tu as également fait un Zénith…
Tu sais, tu ne peux pas faire que des petites salles quand la demande est énorme. Les gens ne comprendraient pas. Il manque clairement en France une salle dans l'entre deux. C'est dommage.
Tu as vécu à Toulouse non?
J'ai vécu une année à Toulouse plus par amour que pour autre chose. J'adore cette ville. Ce qui me plait le plus dans tous ça, c'est que Toulouse donne l'impression d'être une multitude de petits villages collés les uns aux autres.
Fan de Rugby, il y a aussi le Stade Toulousain.
C'est le plus beau jeu d'Europe et Novès reste le plus grand entraîneur hexagonal. Mais en tant que catalan, mon cœur est pour l'USAP. D'ailleurs, Jacques Brunel va nous manquer. C'est un grand monsieur qui a donné de belles couleurs à ce club.
Dernière question, un peu rituelle et délicate : pour toi, c'est quoi une bonne chanson ?
Une bonne chanson, pour moi, est hyper difficile à saisir, c'est impossible d'en sortir. En pop-rock, si j'étais prof, j'enseignerais Instant Street. Elle a une structure bizarre mais reste un chef d'œuvre. Elle résume parfaitement cela. Une bonne chanson est d'abord belle, puissante puis inséparable.
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