Le ministère public a demandé mercredi trois ans de prison avec sursis contre
l’ex-directeur de l’usine Serge Biechlin, et une amende de 225.000 euros contre
Grande Paroisse.
Après quatre mois d’audience, place aux réquisitions dans le procès de
l’explosion accidentelle de l’usine AZF de Toulouse, qui avait fait 31 morts en
septembre 2001. Les procureurs ont requis mercredi les peines maximales prévues
par la loi et ont demandé contre l’ancienne filiale de Total, Grande Paroisse,
qui gérait l’usine, 225.000 euros d’amende et 3 ans de prison avec sursis et
45.000 euros d’amende contre l’ancien directeur de l’usine, Serge Biechlin.
«Serge Biechlin et Daniel Grasset, représentant de Grande Paroisse, sont
responsables et coupables», a martelé Patrice Michel, procureur adjoint de la
République de Toulouse. «Comment Serge Biechlin n’a-t-il pas pensé aux risques
et à l’erreur humaine?», s’est-il interrogé. Il y avait des «dysfonctionnements
graves dans l’organisation et la gestion des déchets» au sein de l’usine ainsi
que dans «la sectorisation du travail» et les différences de traitement entre
les salariés et les sous-traitants, a relevé le procureur. L’accusation attribue
la catastrophe au déversement accidentel sur un tas de nitrate d’ammonium
(engrais ou explosif industriel) du box d’entrée du hangar 221, d’un produit
chloré (DCCNa) incompatible, récupéré dans des sacs au hangar 335 par le salarié
d’une entreprise sous-traitante.
Plus tôt dans la journée et à la déception de plusieurs parties civiles, le
parquet avait confirmé qu’il ne demanderait pas la condamnation du groupe Total
et de son ancien patron Thierry Desmarest. La société Total et Thierry Desmarest
n’ont jamais été poursuivis durant l’instruction. Ils ont toutefois été placés
sur le banc des prévenus au début du procès en février, le tribunal acceptant
une citation directe déposée par certaines familles de victimes, qui estimaient
que Grande Paroisse et Serge Biechlin n’avaient «aucune marge de manoeuvre» face
à la maison-mère. Le parquet s’était opposé à cette citation, estimant qu’elle
était irrecevable.
Cette dernière semaine était consacrée aux plaidoiries des avocats des 3000
parties civiles. Ils ont réclamé presque tous la condamnation pour homicides
involontaires de Serge Biechlin, mais seuls certains ont aussi demandé une
condamnation de la maison-mère Total, voire de l’ancien PDG du groupe Thierry
Desmarest.
L’avocat de certaines familles, Me Cohen, comme Me Bisseuil, n’a toutefois pas
plaidé contre Thierry Desmarest, expliquant qu’on ne peut retenir contre lui la
«faute caractérisée» ou la «violation délibérée des règles de prudence»
indispensables pour mettre en cause «la responsabilité indirecte» d’un PDG. Me
Claire Priollaud, pour «800 parties civiles des quartiers populaires», a en
revanche estimé que l’évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation
permettrait de condamner Thierry Desmarest. S’exprimant sans avocat,
Jean-François Grellier a déclaré pour l’Association des sinistrés du 21
septembre : «Il faut condamner Biechlin (…) mais punir les exécutants sans les
donneurs d’ordre, Biechlin sans Desmarest, serait un déni de justice».
Après le réquisitoire du procureur, les avocats de la défense plaideront de
jeudi à lundi, et le mardi 30 sera consacré aux demandes de dédommagements. Le
tribunal correctionnel rendra son jugement en novembre.
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