vendredi , 26 avril 2024

Toulouse. Entretien avec le photographe Richard Bellia


Le photographe talentueux et de renommée internationale Richard Bellia présentera son exposition « Un oeil sur la Musique » chez Guitars Doktor à Toulouse du 2 au 30 juillet. Entretien fleuve avec un témoin de la musique !

En plus de 35 ans de carrière, Richard Bellia en a foulé des salles de concert. En a vu des lives et des artistes. Des premiers pas à Melody Maker à aujourd’hui, il a croisé David Bowie, Nirvana, The Cure, James Brown, Les Rolling Stones, Serge Gainsbourg et de nombreux autres acteurs de ces quatre décennies .  Une exposition de son travail débarque à Guitars Doktor à Toulouse.

Avant de découvrir son travail, entretien unique avec Bellia. On l’écoute presque religieusement, décontracté et plein d’humour. Le photographe nous parle longuement de son travail, de son exposition à Toulouse , de la musique et de son parcours. S’y révèle alors un homme, un artisan travaillant jour et nuit pour fournir le meilleur de lui même. A Toulouse, il a conçu une exposition dédiée à la ville rose avec des clichés rares de Nougaro et des tirages conçus dans la rolls des laboratoires.

Du 2 au 30 juillet, Guitars Doktor accueille une de vos expositions. Quel est votre état d’esprit avant de présenter une exposition au public ?

Au moment où on se parle, c’est le montage. Ce sont les préparations. Les photos sont prêtes et il faut que je les fasse belles, que je fasse les encadrements etc. J’ai deux jours de préparation. 

Il y a aussi de l’excitation ?

Oui ! c’est un peu le métier. Tu passes tout ton temps dans le noir dans ta cave et puis après, à une date fixe, tu arrives, tu présentes. Les photos sont jolies, tu as mis ta belle chemise. C’est toujours un plaisir. Parce que dans la préparation d’une expo, tu te fais plus que chier sur des détails. Par exemple, une semaine avant l’exposition, tu es en train de t’assurer que les niveaux de gris sont jolis sur telle photo, c’est vraiment dans le détail. Et aussi j’ai fait des tirages spécifiquement pour l’expo de Toulouse parce que c’est un magasin de guitare et que c’est Toulouse. Donc, j’ai fait des photos où on voit des guitaristes en action.

« Je suis donc arrivé avec 3, 4 photos de Claude Nougaro »

D’ailleurs, quelle est la thématique de cette exposition ?

C’est pas vraiment une thématique, je photographie la musique et le Rock’n Roll depuis 40 ans, donc j’ai pas une thématique spécifique quand j’arrive à Toulouse. Là dans les photos que j’ai choisies, on voit beaucoup de guitaristes, beaucoup de guitares. J’ai fait pas mal de photos avec Claude Nougaro il y a 37 ans et je ne les avais jamais montrées. Je suis donc arrivé avec 3, 4 photos de Claude Nougaro et je suis très content de les montrer. C’est là vraiment où j’ai pu me faire plaisir. Il y aura une trentaine de photos, avec au moins 20% spécialement pour Toulouse. 

D’ailleurs, il y a des photos comme ça qu’on cache, qu’on garde longtemps, qu’on n’a pas envie de sortir ? 

Oui, là j’en sors une ! C’est peut-être une des photos les plus connues alors que je ne l’ai pas sortie. Je me suis fait piquer une photo qui a fait le tour du monde. C’est une photo d’un groupe de RAP qui s’appelle Wu-Tang Clan que j’ai faite à Los Angeles en 1997 et qui a fait le tour du monde. Ils l’ont utilisé dans leur disque, il y a des t-shirts qui ont été fait avec… Cette photo est donc très connue et je l’amène dans cette expo. En ce qui concerne les artistes qui plus fréquemment dans mes expos, Nirvana, The Clash, etc j’ai fait des tirages un peu particuliers. Par exemple, j’ai des photos de Kurt Cobain dans la rue, à la guitare. 

Quelle relation entretenez-vous avec Toulouse, à part Claude Nougaro ? 

J’ai exposé au « Dada » en 2018. Il y a également le musicien Michel Cloup, que je photographie depuis très longtemps et dont je suis le travail avec grand intérêt. Bleu Citron (producteurs locaux) sont des gens que je connais aussi. C’est une ville où je viens deux fois par an car c’est mon endroit préféré sur Terre, mais ce n’est pas professionnel. 

Joe Strummer 1989 – Crédit photo : Richard Bellia

Une vraie relation qui est plus humaine, plus personnelle que professionnelle . Une question : Avec le COVID, pas de photos, pas de concerts. Comment avez-vous vécu cette période ? 

 Super bien, j’en ai même un peu une nostalgie. Je trouve que nos métiers se prêtent à ça. Si ton métier est un métier de service, vous avez besoin de l’interaction avec les gens, vous avez besoin de vivre avec des gens autour de vous. Photographe, c’est un vrai métier de solitaire donc tu peux passer un an et demi dans une cave avec des archives et du papier photo. Tu ne t’embêtes pas. 

Je suis fier aussi de voir que 35 ans de travail payent aujourd’hui

En regardant quelques clichés et en vous écoutant, on sent que c’est la musique vous donne les ailes nécessaires pour faire de la photographie ?

Mon intérêt pour la photographie vient du fait d’écouter de la musique  avec mon coeur puis de faire de la belle image. Après, avec ce que j’ai appris à faire avec mes dix doigts, transformer ça en un bout de papier vachement joli. Mais si j’étais amoureux de photographies en disant  : « Tiens, si j’allais photographier l’architecture, les animaux » ça n’aurait pas de sens. Il faut que ça vienne de l’intérieur. Moi c’est la musique . C’est elle qui me motive et Dieu merci parce que quitte à être fan de quelque chose pendant 40 ans vaut mieux ça qu’être fan de la photographie. 

The Cure Athenes 1985 Crédit : Richard Bellia

En 40 ans de photos, vivre avec autant d’archives, on doit regarder dans le rétroviseur.. Quand vous regardez en arrière, qu’est ce que vous vous dites ?

 Moi je pense que je suis une fraude. Evidemment, je passe mon temps dans le passé puisque je travaille dans mes négatifs et en permanence je me dis que j’aurais dû en faire plus. Mais en faire plus plus. Par exemple, je vois Nirvana, je fais 5 photos, elles sont toutes bonnes . Je les revois 3 mois après j’en fait 8 , elles sont toutes bonnes aussi mais je me dis « Pourquoi t’en as fait que 13 en 3 mois ? Pourquoi t’en as pas fait plus ? ». Et je me dis ça tellement souvent. Donc oui, quand je regarde en arrière, je pense que j’aurais dû un peu mieux travailler en fait. C’est assez bien mais que ce n’est pas une raison pour en faire aussi peu. Voilà ce que je pense de mon travail (rires).  Je suis fier aussi de voir que 35 ans de travail payent aujourd’hui. Avec le temps. Je prépare une exposition pour NewYork, une couverture pour un livre de The Cure et Primal Scream ou encore des interventions pour un doc sur la BBC. Le temps passe et mon travail est encore reconnu. Que demander de mieux ?

« La photographie n’est pas une science exacte , c’est un truc où tu dois mettre un peu de travail, d’humilité, de passion , de coeur. »

En plus des photos de concerts, il y a des portraits. Comment crée-t on une telle complicité avec un artiste ? 

Déjà, je ne vais voir que les gens pour qui j’ai de l’admiration, et la deuxième chose, je fais ça vachement vite. Je fais des prises de vue qui durent très peu de temps et je le dis aux gens avant. Je pense que c’est en restant bien à ma place que j’y arrive. Je montre aux gens que je sais ce que je fais, que je sais faire. Typiquement un truc que je fais, c’est que je dis aux gens qu’il y a quelque  chose de plus important qu’ eux et moi dans la photo qu’on va prendre. Qu’il y a un troisième élément qui est plus important que la somme de nous deux, c’est la lumière. Si la lumière est bonne, on va y arriver mais si la lumière n’est pas bonne, on n’y arrivera pas. C’est comme ça que je fais une bonne photo. La photographie n’est pas une science exacte , c’est un truc où tu dois mettre un peu de travail, d’humilité, de passion , de coeur. Tu dois être un animal de sang froid car tu fais attention à tes réglages mais si tu es trop chiant, le mec en face se fait chier. Si tu veux que la personne en face soit vivante, il faut quand même que tu sois un peu distrayant donc réussir une photo n’est pas une science exacte et c’est un peu chacun sa soupe. Moi j’y vais en étant rigolo et en aimant les gens. 

« Un oeil sur la Musique » chez Guitars Doktor à Toulouse du 2 au 30 juillet (5 rue de la Colombette)

Plus d’infos : http://richardbellia.com/ 

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