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Weekend des Curiosités 2017 : Interview de Frànçois and The Atlas Mountains

Frànçois and the Atlas Mountains sont de retour avec le sublime album « Solide Mirage » et un passage par le Weekend des Curiosités 2017 le samedi 3 juin prochain à Toulouse. Rencontre avec l’homme derrière l’un des plus beaux groupes français, François Marry.

La tournée suit son cours avec un passage par le Bikini le 3 juin prochain dans le cadre du Weekend des Curiosités 2017. Dans quel état d’esprit es-tu dans cette période foisonnante sur scène ?
Ce sera une date clef pour nous dans la tournée. Les concerts sont le cœur de mon métier de musicien. La consommation de la musique est devenue tellement stroboscopique que le live a revêtu une importance toute particulière. L’attention est aussi différente que lorsqu’on écoute un album, il faut être à la hauteur de ce qu’ on dit. En live, il faut être dans autre chose.

D’ailleurs, est ce compliquer d’adapter sa musique du studio au live ? As-tu une appréhension de perdre quelque chose ou au contraire d’y gagner autre chose ?
Pas du tout, car cela fait plusieurs albums qu’on prépare par la scène. On donne le ton de nos chansons, de nos morceaux, par la scène. Elles prennent leur forme sur scène. On ajuste le tout en studio. Mais, le développement débute par la scène et se finit en studio. Cela donne des morceaux plus directs et plus clairs.

Tu parles de morceaux directs et plus clairs, c’est exactement ce qui ressort de ce nouvel album, Solide Mirage. Il est plus urbain, plus cash, plus frontal. Est-ce l’idée que t’avais en tête dès le départ ?
Je cherchais une cohérence, un geste plus défini, plus radical à l’image du bouillonnement chaotique de Bruxelles, la vie où je vis actuellement. Puis, il y a aussi le fait de vieillir. De prendre de l’âge, et forcément, on abandonne les utopies pour affirmer une certaine réalité de notre société, de notre vie. Donc j’ai affirmé cela par les textes et par le propos musical en lui même.

« On se réfugie souvent dans l’art dans des moments comme cela »

L’année 2015 et les événements en France, et aussi en Belgique, rappelons que l’album a été enregistré à Molenbeek, a joué un rôle dans la construction de cet opus ?
2015 a eu forcement un impact sur l’album. 2015 a contribué à dire que le confort de la vie était sur le fil du rasoir. Qu’il faut se consacrer à l’art. La vie, la culture, sont devenus fragiles et précieuses. On se réfugie souvent dans l’art dans des moments comme cela. Mais ce n’est pas le cas partout dans le monde. En voyageant, lors de la précédente tournée, notamment dans des pays où il y avait des conflits, comme le Liban ou l’Afrique, on se rend compte que ce repli culturel est une grande chance pour nous. Ils n’ont pas la chance de l’avoir. Leur priorité reste de se nourrir, de vivre, cela vient après le bien être. L’art et la culture sont les dernières roues du carrosse. Et, il est même difficile de s’y consacrer pleinement car il y a pas tout ce qu on peut avoir ici au niveau des organisations, des aides…Donc si pour nous c’est un repli, ce ne l’est pas pour tout le monde.

On parlait de l’année 2015, mais initialement l’album devait s’appeler KO Chaos Cacao, que j’aime beaucoup pour la signification du Cacao, amère et sucré à la fois. Pourquoi un changement de nom pour le sublime « Solide Mirage » ?
Pour une question de lisibilité. Solide Mirage possède plus d’angles de compréhension. Il fait plus fini, plus ludique. KO Chaos Cacao me semblait trop limité dans le champ du plaisir. Le titre est une porte d’accès à un album, il ne doit pas être réducteur.

Comme sur les précédents, on retrouve dans l’album une grande force d’écriture, une passion pour les mots, les jeux de mots, les figures de styles. Comment est née cette passion pour la langue et surtout le soin apporté aux textes ?
Je pense que cela vient du fait que je suis assez maladroit avec les gens que je rencontre. Il m’arrive souvent de les mettre mal à l’aise, sans le vouloir, mais on peut me trouver distant ou froid, ce que je ne suis pas. Du coup, je me replie sur l’écriture pour faire passer quelque chose. Avec le temps, j’ai su équilibrer cette maladresse.

Et ce second sens dans les chansons…
Je le cache justement. Je le camoufle sous d’autres mots et il y a souvent plusieurs lectures même si je reste plus cash. Comme dans Deux pareils, les gens ne se rendent pas compte qu’il y a quelque chose de très érotique. La musique pop est fun pour cela, car il y a plusieurs niveaux de lecture. Et le visuel permet aussi de découvrir autre chose. Il faut rentrer dans un univers.

Depuis Piano Ombre, le groupe a changé. Est-ce que les membres de François and the Atlas Mountains te font opérer des changement? A quel moment rentrent-ils dans la création de l’Album ?
Très tôt. Je vais dans une direction par rapport aux musiciens. Piano Ombre a été écrit pour certains. Pour le dernier, il fallait du rythme, du chaloupement , ils voulaient de la sueur, donc j’ai pensé dans ce sens là les chansons. Pour ainsi dire, je compose et écris les chansons de mon côté puis, je fais les arrangements, la mise en place avec eux sur l’énergie qu’ils dégagent. Puis c’est mon premier public. Je chante en live certaines chansons mais aussi devant eux avant de les enregistrer. Ils me rendent compte de ce qui marche ou pas .Si des choses ne passent pas je modifie.

« Il y aura une version anglaise des titres qui sortira en septembre »

Pour la première fois sur un album, tu chantes exclusivement en anglais, pourquoi ce choix ?
Oui mais il y aura une version anglaise des titres qui sortira en septembre. J’avais d’autres textes que je n’ai pas enregistré. Je savais qu’on allait jouer en France lors d’une période électorale, je voulais que les propos soient plus clairs. Puis il fallait regrouper l’album autour de ses dix chansons, qui ont des registres différents. J’ai trouvé une cohérence en le réduisant au français.

Tu écris de nombreux textes pour tes albums, que fais-tu des chansons que tu ne sors pas ? Tu les prépares pour d’autres moments ?
Parfois c’est ça comme ma collaboration avec Rone. Mais il n’y a pas de formule pour les chansons. Elles apparaissent selon le véhicule et le projet qui correspond, sinon je les abandonne. La chanson 1982 a déjà six ans, et j’ai pu la sortir pour ce projet là.

Pour ce nouvel album, tu retrouves le producteur Ash Workman. Qu’est ce qu’il apporte à ta musique?
Il a un côté terre à terre, dans le bon sens du terme. Il choisit le son à la prise du coup tu te contentes du moment. Il se concentre sur une prise, mais quand c’est fait c’est fait. Il y a ce truc du moment qui me correspond bien. Et surtout, il laisse les groupe décider de la couleur .C’est une gageure pour un artiste de ne pas se faire détériorer son intention. Un producteur donne juste l’éclat de plus à ta musique.
Dans l’album deux chansons m’ont marqué. D’abord Bête Morcelée qui est très différente du reste. Pourquoi cette chanson très rock très courte et brutale ?
J’avais d’autres chansons dans ce registre là. Un registre que j’aime et qui me rappelle ma jeunesse aussi. Je voulais plus de distorsion car familièrement cela évoque pour moi le chaos de la ville. Ce n’était pas les meilleurs morceaux . J’ai pu en garder une en passant au dessus du véto du groupe.C’est un petit clin d’oeil au temps où je jouais aussi avec Petit Fantôme et à mes 16 ans.

Et puis il y a Les Rentes écloses qui clôt de manière apaisée l’album. Pourquoi cette chanson plus calme, cette respiration, ce brin d’espoir ?
Oui c’est de l’espoir ! C’est presque une longue plage méditative comme ce que j’écoute, comme les ondes binaurales qui sort les ondes pures musicales. C’est juste des vibrations.Une vibration pour sortir du discours après le Grand Dérèglement et la nostalgie d’Apre Après. Je voulais glisser vers l’abstraction pour sortir de l’album.

« Je reste surtout lucide et conscient »

Est ce qu’au final, on peut dire que tu es un chanteur politique ?
C’est difficile de jouer avec ce terme. Ne pas avoir d’attitude est un positionnement aussi. Il faut être honnête et je ne peux pas faire sans une pensée affective sur l’humain et le social. Notre consommation est aussi une preuve de notre acte politique. Savoir à qui on donne de l’argent en dépensant de l’argent etc…Nos goûts aussi sont politiques. Bref, j’aurais jamais fait la même musique sinon. Si Solide Mirage souligne plus ça que les autres, ce fut toujours là. Je reste surtout lucide et conscient.

Qu’aurait pensé le petit François de ce qu’est devenu le grand François ?
Je ne suis pas encore assez vieux pour cela (rires). J’avais des rêves fous quand j’écrivais des chansons dans ma chambre. C’est au delà de mes espoirs. Vu comment le François à 18 ans agissait, je ne pense pas qu’il avait une autre voix que celle là.
Que représente pour toi le Weekend des Curiosités pour finir ?
C’est un nouvel assemblage qu’on ne pouvait pas songer comme la présence de Romeo Elvis que j’aime beaucoup. Il est belge, et il me tarde de le voir. En plus il y a beaucoup d’affinités avec ce que je fais.

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