«J’ai vu toute une armée obligée de
vivre dans ses propres excréments, sans autres latrines ni égout que la mer.
A tout moment nous avons rencontré des hommes disciplinés et résignés dont
le récit fait plus de mal que n’importe quelle plainte qu’ils auraient pu
nous faire !»
(Jean-Maurice HERMANN, Dans les camps d’internement des Républicains
espagnols du Roussillon, Le Midi Socialiste, Février 1939).

Février 1939 : 500 000 combattants républicains espagnols, hommes, femmes,
enfants et blessés battaient en retraite, la mort dans l’âme, et refl uaient
vers la France… C’était la «retirada». Ils venaient de perdre les dernières
batailles de la Guerre civile (en particulier celle de Barcelone), face aux
troupes franquistes,
soutenues activement par MUSSOLINI et HITLER. Ces combattants de la liberté
furent pour la moitié d’entre eux parqués dans les camps de «concentration»
(«les camps du mépris» si bien analysés par René GRANDO) édifiés à la hâte,
sans moyens, par les autorités françaises (Argelès, Saint-Cyprien, Le
Barcarès, Collioure, Agde, Le Vernet d’Ariège, Gurs, Septfonds, Bram…) qui
ne firent rien pour les accueillir dignement et avec l’humanité et la
fraternité qu’ils étaient en droit d’attendre. C’était aussi le temps du
déchaînement de la part de la presse propagandiste d’extrême droite qui
attisait la xénophobie. Les «rouges» espagnols furent alors présentés comme
des «pillards», «tueurs de curés» ou «déterreurs de carmélites». Pourtant,
l’opinion publique ne fut pas dupe et la solidarité s’organisa : les élus et
partis politiques de gauche, les syndicats, la Croix-Rouge, les Quakers, la
Cimade, les Francs-Maçons et autres intellectuels et dignitaires religieux
se mobilisèrent pour atténuer les souffrances des Républicains espagnols, en
faisant pression sur le Gouvernement DALADIER qui affi cha, la plupart du
temps, une attitude méfi ante et autoritaire à leur égard. Par la suite, le
régime de Vichy durcit
considérablement le système d’internement et n’hésita pas à livrer cette
population concentrationnaire aux appétits meurtriers des franquistes et des
Nazis.

Février 2009 à Calstenau d’estretefonds (20 mn de Toulouse): soixante-dix
ans après les faits, la Mairie de Castelnau d’Estrétefonds souhaite rendre
un hommage appuyé aux Républicains espagnols en tentant d’effectuer un
travail de mémoire de l’exil. A ce titre, l’exposition «Républicains
espagnols en Midi-Pyrénées – Exil, histoire et mémoire», une pièce de
théâtre, une table de livres dédicacés par leurs auteurs, trois projections
de fi lms, suivies de débats, et une soirée conviviale animée par l’école de
musique de Castelnau d’Estrétefonds et le musicien engagé Vicente PRADAL
nous permettront de rappeler, comme Lucie AUBRAC, et au regard de ce combat
internationaliste contre le fascisme, que «le verbe résister se conjugue au
présent !»