mercredi , 24 avril 2024

Interview : Superpoze, « c’est dans le noir que ressort le mieux la lumière »

Auteur d'un des albums les plus intéressants de l'année, « Opening », Superpoze sera en concert au Red Bull Music Academy au Bikini. Retour sur notre rencontre de mai 2015 avec Gabriel Legeleux !

Après avoir émergé de la scène électro caennaise en un temps record, Superpoze, Gabriel Legeleux quand il fait jour, a enchaîné les étapes de sa courte carrière comme on mange les kilomètres. Une tournée live qui l’amènera dans les plus gros festivals (des Trans Musicales au Montreux Jazz Festival), des DJ-sets qui l’amènent partout en Europe, deux EPs sortis sur son propre label Combien Mille Records, un EP et une tournée avec son groupe Kuage, une collaboration avec son ami Stwo, et un maxi chez Kitsuné.
Le résultat se retrouve dans un album concis, homogène et infiniment ouvert. Opening est une petite révolution dans le “son Superpoze” : moins affilié à l’historique du beatmaking dont il a été friand pendant de longues années, ce disque marche sur des terres inexplorées : celles d’une électro extrêmement touchante, personnelle et qui ose les mélodies comme jamais auparavant.
Rencontre avec notre coup de cœur du Festival du Weekend des Curiosités 2015 qui sera en février au Red Bull Music Academy au Bikini !

[Interview de mai 2015 ] Déjà comment te sens-tu dans cette tournée ?
C'est super, un peu fatigué par certains concerts qui sont juste dantesques. Mais je suis heureux de voir les concerts complets, voir les gens s'y amuser et découvrir mon nouvel album. Comme l'album est différent de mes EP, j'appréhendais un peu la rencontre. Clairement, je suis emballé par les retours. Puis, Superpoze c'est toujours moi et en live rien ne change, malgré le fait que ce soit quand même différent. C'est toujours moi avec la même énergie et la même passion.

Tu repasses à Toulouse, au Weekend des Curiosités, deux ans après un premier passage remarqué. Quel souvenir gardes-tu de ce premier live toulousain ?
Quel souvenir ! C'était énorme, tout simplement ! Je m'en souviens que trop bien, ce fut l'un des grands souvenirs de ma première tournée. Un Bikini complet, blindé, c'était la folie ! Au début le Bikini était un rêve pour moi. Tout le monde m'en parlait ; aussi bien de l'ambiance que de l'endroit. Je m'y voyais vraiment ! Puis ce fut le cas ! Maintenant j'ai d'autres rêves après que celui là se soit réalisé…

Quel genre de rêves ?
Bouger un peu plus avec ma musique. J'aimerais beaucoup découvrir le Canada. Pour la préparation de l'album, j'ai pu découvrir l'Asie, l'Amérique Latine ou l'Europe de l’Est, maintenant j'ai d'autres rêves que je garde un peu secrètement pour moi en attendant de les réaliser.

Tu as mis un peu de temps entre la sortie de ton dernier EP et celle de l'album. Un temps nécessaire pour toi ?
Le dernier EP, Jaguar, date de septembre 2013. Je ne savais pas si j'avais réellement besoin de temps. Mais je voulais changer, évoluer, grandir dans mon travail. On évolue : les volonté changent et les sensibilités aussi. Donc il faut un temps pour laisser le mouvement se faire. J'aurais pu sortir un album rapidement, avec le son des débuts. Mais ce serait enfermer Superpoze dans un registre. En plus d'un nom de scène, Superpoze c'est moi. C'est Gabriel. Je ne voulais surtout pas me bloquer. Je vois plus large comme le nom de l'album « Opening ». C'est un début. Le début d'un cycle ; tout en étant dans la cohérence de mes précédents EP. De la nouveauté sans renier les débuts.

Comment juges-tu alors cette évolution jusqu'à la sortie de Opening ?
Je manque un peu de recul. Je suis ce que j'ai envie de faire. En 2012, je découpais des sons, je faisais des recherches. Puis j'ai eu envie de faire autre chose. C'est une évolution totalement naturelle. Tu sais, je suis un passionné de musique. Réellement amoureux. Je cherche toujours des sons, des structures, des textures, j'en ai besoin. Je ne peux pas me dire que c'est un taff, mais plutôt un cheminement logique dans ma construction. Je suis mes envies !

Tu parles de changement. L'idée de changer de blase pouvait être envisageable ou pas du tout ?
Il n'est pas question de changer de nom. Superpoze est mon nom de scène, je l'aime et il est en construction permanente. Tout est toujours en construction chez moi, même les lives. Chaque soir, je fais de nouvelles choses sur scène. Je suis en permanence dans l'évolution, et mon nom est le lien de tout cela. Et puis, un album n'est jamais terminé. Tu ne termines pas un album, tu l'abandonnes. Celui là, je l'abandonnerais quand j'aurais atteint certaines choses, en attendant je le modifie tous les soirs.

Comment as-tu composé cet opus ?
Par étape. Il y a eu plusieurs phases clairement dans sa construction. En janvier 2014, j'ai commencé à faire quelque chose. Je ne voulais pas un album collectionnant les morceaux mais un tout. Je suis donc reparti chez mes parents dans un Home Studio. Là bas, j'ai retrouvé mon piano d'enfance. Un piano qui me tient à cœur, et qui était la seule chose ancienne qui restait dans la pièce. Au départ, je n'avais pas pensé au piano comme élément principal de création. Je n'avais pas prévu qu'il serait à la base de mon travail. Avant je travaillais mes sons de façon assez pop, efficace, là je ne voulais pas conceptualiser le truc en amont. Je voulais que l'ensemble se justifie à lui même. J'ai donc lancé plusieurs choses à la fois, j 'ai arrangé de nombreux morceaux et me suis laissé posséder par ma création.

Le piano donne ce côté mélancolique à Opening j'ai l'impression.
Tout à fait, le piano donne cet effet là. J'ai une tendance d'ailleurs à la mélancolie. Je trouve ça tellement beau que je voulais laisser durer cette impression.

A l'écoute de l'album, il y a un côté sombre mais à la fois très lumineux. Étais-tu à la recherche de ça ?
Non je ne cherchais rien. Mais c'est juste ! Certaines personnes pensent que c'est dépressif, d'autres que c'est solaire. Pour moi il y a les deux. Sans prétention aucune, je pense à Soulages avec cet album. C'est dans le noir que ressort le mieux la couleur. J'ai juste fait de la musique dont des émotions en découlent.

Sur la pochette de l'album, tu mets ton visage en avant. Pourquoi ce choix ?
Me mettre en avant sur la pochette ne me dérange pas, je faisais déjà ça avant. J'aime quand la musique est incarnée. Voir l'homme derrière le son. Mettre un visage sur ce que j'écoute. Je l'ai confié à un photographe et on est parti sur plusieurs pistes avant d'arriver à cet effet de sculpture de bronze.

S'il y avait un son dans l'album à retenir ?
Je n'ai pas envie d'en dégager un seul. Je suis parti en février 2014 en Asie, après les trois premiers sons. Quand je suis revenu d'Asie, je n'ai pas composé une seule ligne. Le Japon, par exemple, allie une frénésie esthétique et un savoir-faire unique qui faisait passer mes morceaux pour des œuvres trop lourdes. Un jour, j'ai achevé Oversize, et j'ai pu enchainer plus facilement. Je pense que ce fut un déclic dans l'album. Après le sixième morceau a été composé à Brussels, et il a quelque chose de différent. Une force s'en dégage. Mais l'album s'écoute en entier comme un cheminement personnel. Quand tu composes seul, il y a forcement des influences de ta vie qui entrent en jeu.

On t'a connu avec de nombreuses reprises. As-tu toujours des projets de remix ?
Je travaille actuellement sur plusieurs projets. Je ne peux pas en dire plus car si ce n'est pas assez bon je ne les sortirais pas. J'ai aussi un projet de collaboration pour des morceaux de l'album.

Quelques mots sur Kuage, ton autre projet avec Stwo.
On a fait une petite tournée avec Adrien que je produit sur mon label. On était en collocation et on a décidé de faire de la musique ensemble. Un truc plus techno, plus club. On a composé dans ce sens là sans aucune idée derrière la tête. C'est une belle phase de récréation dans nos projets perso.

Enfin, que penses-tu de Superpoze ?
Je pense qu'il a sorti un super album (rires). C'est de plus en plus moi, Gabriel.

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